Il est des résurrections plus tendancieuses. Après une belle traversée du désert passée à creuser de plus en plus profond (All that I am, Shape Shifter ou Corazón), votre serviteur ira même jusquà dater la sécheresse de la chose après le splendide Milagro (en 1992), Santana et compagnie commençaient à très sérieusement à piocher dans les fonds de tiroirs de commodes au rabais et ce nest pas le grammysé et pourtant fort palot Supernatural (1999) qui changeait la donne. Laffaire sentait donc la cagette à plein nez et cest au moment où les exégètes commençaient à faire chauffer la nécrologie musicale du guitariste que celui-ci pris la décision, radicale mais géniale, de réunir autour de lui le line-up (ou presque) qui laccompagna de Woodstock au culte multi-platiné Santana III : Gregg Rolie (claviers), Neal Schon (guitares), Michael Shrieve (batterie), Mike Carabello (percussion) auxquels sajoutent Karl Pezzaro (percussions) et Benny Rietveld (basse). Ne manquent à lappel que David Brown, décédé en 2000, et José Areas. Voilà pour lhistoire.
Pour fêter cette réunion magique (mystique ?), chacun participera à lécriture des seize titres présents et lheure et quart de musique proposée. Mais la grande question restait de savoir si la magie allait réapparaître comme par enchantement, quarante ans après les faits. Dès lintroductif « Yambu », le choc ressemble à un ouragan électrique. Une énergie folle, contenue dans une sorte dincantation de ce qui va se déployer ensuite. Un appel à la recharge. Un désapprentissage qui évite les mauvais réflexes récents. Un exercice de jonglage, en équilibriste, fait de turbulences sous contrôle, prompt à décrocher la Lune de ceux qui ny croyaient plus. Et les Cassandres de se péter la gueule.
Cétait magique. Nous navions pas besoin de forcer lénergie ambiante elle était déjà intense. À partir de là, il nous fallait juste essayer de trouver le bon équilibre dans les chansons et les jams de sorte que les gens puissent immédiatement les identifier comme du Santana.
Évidemment, la puissance du groupe nest plus tout à fait la même. Mais des morceaux aussi emballants que « Shake It » ou le single « Anywhere You Want to Go » sur lequel chacun y va de son solo, confirment que la réunion na rien dimprovisée, ni de mercantile. Le psychédélique « Fillmore East » (quasiment huit minutes), les rutilants « Love Makes the World Go Round » et « Freedom in your Mind » avec Ronald Isley au chant, nous permettent de toucher les origines du bout des notes. Même si la longueur un poil excessive de lalbum (trois ou quatre titres auraient mérités de figurer en bonus afin de recentrer les choses) sappesantit sur des titres hors du cadre générique (« Suen Os », « Forgiveness »), laspect joyeux des retrouvailles prend aisément le dessus avec le diptyque festif et moderne « Choo Choo » / « All Aboard » ou le charnu « Echizo ».
Au bout de laddition, ce vingt-troisième album du guitariste retrouve ce son chaud typique, sans esprit de contrefaçon. De la musique jamais grincheuse, toujours éclairée. Sil peut manquer parfois de concision, IV exalte une aisance, une attitude à la cool digne des grands disques fluides de Santana. En retrouvant la recette dantan avec un son modernisé, il ne surprend plus par les univers abordés, mais décoche un portrait musical aux montées dadrénaline irrésistibles.
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