Eh bien, les fans des impros vocales de Wyatt "Out of work pop singer" devraient se précipiter sur cet album qui mérite bien son 10/10 aux côtés de Rock Bottom ! A l'heure où l'ancien batteur de la machine folle fait à nouveau parler de lui, je me décide enfin à m'attacher à l'exégèse désordonnée, passionnée, et non objective de ce manifeste du Free jazz psychédélique.
Un album de Wyatt en 1970, c'est un concentré de Wyatt !!! Ce personnage captivant était trop sauvage et fougueux pour exprimer pleinement sa créativité débridée au sein dun groupe quel quil soit. En effet, lhumour décalé et déviant de Bob, sa propension au délire, et son goût pour labsurde en tant quélément moteur de la création détonnent même au sein de la Machine molle, combo allumé sil en est, et dans lequel il officie encore à l'époque !
Robert s'enfonce ici avec allégresse dans le Chaos de l'Existence agie et plurielle. Et Wyatt l'a, cet instinct du Chaos !!! Manipulation de bandes magnétiques, déformation de la voix, percussions noyées d'échos . Vaguement portées par une trame, les impros partent en tous sens, le piano galope, enfiévré, et les percussions s'envolent. Des mélodies et des harmonies sont esquissées, mais noyées aussitôt dans tout ce déferlement. Que dire, sinon que les trouvailles qui se bousculent les unes les autres sont de tous ordres : rythmiques, mélodiques, harmoniques ; et que les bruitages, les ambiances, les fanfares éthyliques, s'entrechoquent pour donner naissance à un univers musical unique et halluciné.
Et c'est à chacun de créer son chemin là dedans, de-défricher-de-déchiffrer, d' individualiser la perception qu'il en a. C'est comme pour les suites orangées du Dream, sauf que c'est de touches de couleurs jazzy qu'est recouverte cette peinture impressionniste. Wyatt en installe la toile de fonds rythmique, et invite la section de cuivres du Keith Tippet Group à apporter de la couleur (c'était déjà Robert qui eut l'initiative d'inviter ces cuivres à rejoindre Soft Machine). Et ils accomplissent leur tâche avec brio, ces gaillards ! Stimulés par les échafaudages polirythmiques installés par le batteur fou et Cyril Ayers, talentueux percussionniste, ils exorcisent ce free jazz qui leur tiens tellement à coeur. Avec ses montées d' intensité, et ses accalmies, -les notes se raréfient- , "To Nick Everywhere" sonne comme une Mer, qui, avec la marée montante, ramène avec elle toute une faune frétillante et insolite !!! Résultat : on voit bien qu Elvin Jones et Pharaoh Sanders ont fait des émules en Grande Bretagne ! Chapeau bas à Neville Whitehead, dont les doigts fous se promènent gaiement sur le manche.
Sur "To Caravan and Brother Jim", et "To Carla Marsha and Caroline", ainsi que sur "Las Vegas Tango", on peut observer un subtil travail mélodique et harmonique. Mais cest surtout le sceau du bouillonnement rythmique dun batteur fou qui caractérise cette Oeuvre. Le plus étonnant est le souffle lyrique qui se dégage malgré tout, dun pareil édifice !!! Cette musique, sans tomber dans les pièges de l' abstraction, ne se complait aucunement dans une trop grande simplicité mélodique. Toutefois, cet opus très jazz, n'est pas recommandé aux cardiaques !
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Track-list de The End Of An Ear
Side 1 1. Las Vagas Tango Part 1 (8:13) 2. To Mark Everywhere (2:26) 3. To saintly Bridget (2:22) 4. To Oz Alian Daevid and Gilly (2:09) 5. To Nick Everyone (9:15) Side 2 6. To Caravan and Brother Jim (5:22) 7. To the old World (Thank you for the use of your body, Goodbye) (3:18) 8. To Carla Marsha and Caroline (For making everything beautifuller) (2:47) 9. Las Vagas Tango part 1 (11:07)
Total Time: 46:49
Line-up de The End Of An Ear
- Robert Wyatt / drums, Mouth, piano, organ - Neville Whitehaed / bass - Mark Charig / cornet - Elton Dean / Alto Saxello - Mark Ellidge / piano - Cyril Ayers / assorted percussion - David Sinclair / organ
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