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Fiche d'informations
LOREENA MCKENNITT
Pays : Canada Genre : Folk / Celtique Dates : 1957 URL : cliquez ici - Avis : 89 note(s) et 6 critique(s) - Moyenne albums : 8.37 - Classement : 293 - Consultations groupe : 41190
- Avis : 89 note(s) et 6 critique(s) - Moyenne albums : 8.37 - Classement : 293 - Consultations groupe : 41190
Article
22/05/2012
Cette année, Loreena McKennitt aura fait escale à Paris. Sur les planches du Grand Rex, salle mythique à l’acoustique assez généreuse pour laisser planer la voix foudroyante de la chanteuse canadienne. Dans un monde d’égos généralement surdimensionnés, Loreena a exceptionnellement accepté de passer l’épreuve de l’entretien. Chose rare, précieuse, tant elle n’a pas pour habitude de s’étendre sur son œuvre, sa vocation, sa vie, ni même son métier. Encore moins de vouloir faire de sa promotion un sacerdoce, encore moins un rituel marketing. La discrétion en mode de fonctionnement lui va bien. Et elle s’y tient. La Voilà . Enthousiaste, curieuse, souriante malgré le voyage, « la nuit dernière nous donnions un concert à Londres », attentive, chaleureuse. Si la rencontre pouvait susciter un peu d’appréhension, une fois arrivée et tellement naturelle, sans fard ni faux semblants, chevelure rousse incandescente, on se sent dès lors à l’aise dans la confidence. Et elle peut déployer sa bonne humeur malgré l’anglais approximatif de l’interviewer, « ne vous en faites pas, je ne suis pas particulièrement douée en français ». On peut alors remonter aux origines. De son Canada natal, elle garde les racines ancrées au plus profond de l’inspiration, « j’ai grandis dans une petite ville du Matinoba. Mon père élevait du bétail et ma mère était infirmière. J’aimais les animaux et je souhaitais devenir vétérinaire ». Heureusement, les choses tourneront autrement. Venir à Paris n’est pas une première mais elle ne joue pas la blasée, « enfant, je n’avais pas d’aspiration à devenir une chanteuse ou de faire carrière dans la chanson. C’est seulement lorsque je suis allée à l’université que j’ai eu l’opportunité de jouer et chanter. J’ai su à ce moment là que je souhaitais poursuivre dans cette voie. A l’origine, il s’agissait plus d’un acte de curiosité ». La curiosité. Le mot est lâché. Il reviendra souvent pendant la conversation. Comme le leitmotiv d’une carrière presque trentenaire, « j’aime faire des recherches pour ma musique. Pas seulement des recherches que j’appellerai académiques sur tel ou tel sujet mais également archéologiques, historiques, géographiques. Cela me permet de m’imprégner d’un sujet, d’un concept. Cela fait partie du processus ». On comprend mieux sa passion des voyages, « tout le monde a un hobby ! Cela peut être la nourriture, les chapeaux, les vêtements… ou voyager à travers le monde » et les paysages déployés dans cette musique « véritable documentation » de ses périples. Et au-delà de ces pérégrinations, Loreena se plait à dévorer tout ce qui traite de son sujet, « je lis beaucoup, surtout des ouvrages historiques ou rédigés par des explorateurs », cumulant tout ce qu’elle peut, « je collecte énormément d’informations. Ainsi, je peux extraire les éléments les plus importants et en retirer un fil conducteur, une cohérence pour un album, un concept ». Pour elle, la création d’un album est un assemblage d’éléments très divers pointant vers un objectif unique, « comme un parapluie où chaque chanson serait une des baleines se rejoignant au sommet. Chaque morceau est ainsi connecté avec les autres. C’est un principe presque chimique ». La théorisation des choses l’emmène même à considérer la façon dont le cerveau « réagi non pas aux différents styles musicaux mais aux différents sons, comme ceux de l’océan ». Elle aimerait avoir un modèle pour mieux comprendre cette mécanique, « ce serait très intéressant d’étudier ces phénomènes pour comprendre comment fonctionne le cerveau car il y a quelque chose d’affectif dans l’écoute de la musique ». Et d’affectif il est question dès que l’on aborde le sujet de sa voix. Cet « instrument » ensorcelant qui n’a jamais varié dans son alchimie depuis Elemental sorti en 1985. Cette tessiture, incroyable d’émotions, qui ne trouve que peu d’équivalent dans la virtuosité déployée sur les horizons explorés : Lisa Gerrard, peut-être. « J’ai pris des cours de piano vers cinq ans et comme les autres élèves, je faisais partie d’une chorale, mais rien de plus. C’est uniquement vers treize ans que j’ai commencé les cours de chant, pendant cinq ans environ. J’ai appris les techniques de chant Classique, la façon de protéger ma voix, comment la renforcer aussi… mais depuis, pas grand-chose ». On en vacillerait presque. Ce jour-là , Loreena évoque son dernier album en date, The Wind That Shakes The Barley, condensé de reprises du folklore celte et de compositions originales, qu’elle a depuis complétée par un court enregistrement public, Troubadours On The Rhine : « L’an dernier en mars, nous sommes allés faire la promotion de cet album en Espagne, en Turquie et en Allemagne où nous avons pu participer à un programme radio. Comme il s’agissait d’un voyage promotionnel, je n’étais accompagné que de Brian Hughes et Caroline Lavelle. Le disque est l’enregistrement de cette émission. Après celle-ci, nous sommes repartis en tournée. Ce devait être en automne, et je me suis dit que ce serait bien d’avoir un nouveau disque pour nous accompagner sur la tournée de printemps. Nous avons donc décidé de sortir cet enregistrement ». Au passage, Loreena a dû éliminer quelques morceaux cultes de son répertoire, « Mummer’s Dance ou Santiago nécessitent des percussions, une batterie, ce genre de choses alors que d’autres titres se prêtent mieux à une interprétation intimiste, avec juste deux ou trois musiciens. C’était l’un des critères de la sélection. Ensuite il fallait créer une séquence avec les différents titres possibles. Ce fut le plus compliqué ». Le concert, délicat, aura réclamé une approche nouvelle des titres, une revisite en filigrane d’où ressort le talent mélodique de la compositrice, les qualités des musiciens et, bien entendu, l’interprétation. « Quand tu interprètes une chanson avec deux musiciens, tout devient plus simple, plus direct. J’ai commencé en chantant dans la rue alors je n’ai pas été plus destabilisée que cela ». L’exercice de style en a perdu plus d’un(e) mais il convient à merveille au style de Loreena McKennitt, « tout part du public. Leur attitude est forcément différente s’il s’attend à grand spectacle avec des lumières ou s’il vient pour quelque chose de plus intime. Ce type de concert à la radio nous rapproche du public, on peut voir l’expression des visages, mais aussi leur plus forte implication dans la musique ». L’expérience qui peut aller jusqu’à transformer la musique elle-même, « Pas de façon drastique évidemment », par son rapport avec les spectateurs « lors de la plupart des concerts, on peut marcher sur scène, regarder le public, mais tout est si sombre, c’est une expérience très singulière. On entend les gens applaudir sans jamais vraiment les voir » et cette nouvelle proximité a nourrie l’interprétation, « c’est un paradigme psychologique très intéressant, on se sent tellement mieux de pouvoir apercevoir le public «. D’autres rencontres ont émaillé une carrière riche d’une dizaine de millions d’albums vendus. Un chiffre qu’elle relativise encore, « l’industrie musicale change tellement vite », toujours dans sa volonté d’indépendance qui la poussa à créer dès ses débuts son propre label, Quilan Road. Depuis, le temps a passé. Alors qu’elle assurait la première partie d’un certain Mike Oldfield, ici même à Paris, il y a près de vingt ans, « je m’en souviens, toute l’équipe du concert était en retard. J’étais pétrifié devant un public aussi nombreux. Il y avait des milliers de personnes et lorsque je suis entrée en scène, les gens ont réclamé Mike Oldfield évidemment. C’était terrible ». Toujours très discrète sur sa vie privée, qui a connu bien des épreuves comme la disparition de son compagnon, de son frère et d’ami proche dans un accident de bateau en 1998. Sa carrière entre parenthèses, elle prit son courage à deux mains et fonda le Cook-Rees Memorial Fund avant de revenir en 2006 avec An Ancient Muse, plus oriental. A nouveau, les voyages avaient nourris son inspiration et l’enregistrement aux studios Real World de Peter Gabriel acheva ce long processus créatif, « c’est un endroit extraordinaire pour travailler. J’aime la campagne canadienne, qui est une grande source d’inspiration pour moi. Et les studios procurent ce même sentiment. Ils sont vraiment magnifiques. Ils sont construits dans un ancien moulin à l’écart du bruit ». La rencontre avec des musiciens venus d’horizons différents mis en abime toute certitude, « la disposition des lieux changent radicalement des studios classiques, qui sont généralement fermés les uns aux autres. Aux studios Real World, les choses sont très spéciales car les artistes sont issus de musiques parfois très différentes. Les musiciens et les producteurs se retrouvent autour de la table ou autour d’un verre de vin. Ils se proposent de jouer les uns avec les autres, c’est quelque chose d’extrêmement amusant et intéressant. Et puis côtoyer des personnes qui viennent d’univers très différents, comme le heavy metal par exemple, reste quelque chose de toujours enrichissant. Les artistes suivent une certaine discipline là -bas et se nourrissent de leurs musiques. Cet échange est au cœur des studios Real World ! ». Si Loreena McKennitt soigne les mots, c’est aussi qu’elle les respecte. Il suffit d’apprécier ses fameuses adaptations de poètes classiques qui ont offert, au fil des albums, de grandes chansons (Alfred Noyes sur « The Highwayman », William Shakespeare sur « Cymbeline » et « Prospero’s Speech », Yeats sur « The Two Trees », Walter Scott sur « The English Ladye and the Knight »), mais aussi son titre de Docteur honorifique en Droit de l’Université de Manitoba. Loreena McKennitt est étonnante. On a le sentiment qu’elle approche la musique, comme le reste, avec le même esprit de découverte, la même curiosité à étancher. Elle qui appris le piano à 5 ans et, plus tard, la harpe après avoir découvert Alan Stivell, sait prendre son temps pour peaufiner son travail avec le sens aiguisé de l’artisanat, le goût prononcé des choses bien faites, « cela me prend beaucoup de temps pour créer un nouvel album, mais il faut faire attention à tant de choses… «. Après sa tournée d’été qui passera à nouveau par l’Europe, puis l’Amérique du Sud, elle promet de revenir en studio. Avant cela, elle espère pouvoir enfin aller en Inde, « c’est l’un des endroits où je souhaite vraiment aller ». Probablement pour y découvrir une nouvelle source d’inspiration et donner corps à cette musique qui déborde de vie. Cyrille DELANLSSAYS Propos recueillis le 6 avril 2012 Remerciements à Olivier Garnier de Replica
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